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Ann Sarah
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6 septembre 2006

L'hôpital

Voilà, je suis dans le moment où, après avoir vécu le plus difficile, je recommence à vivre. Il m'aura tout de même fallu pour cela l'hôpital. Je vous raconte.
Je n'en ai pas honte, en fait, je n'en avait pas honte jusqu'à maintenant. Je réalise après coup que c'est un gros morceau et que je n'en parlerais pas nécessairement ouvertement à quelqu'un. C'est gros comme un avortement, on ne s'en vante pas puisque nous ne savons jamais ce que pense la personne devant nous et peut-être sa réaction pourrait nous décevoir. Mais peut-être notre expériance pourrait aussi lui venir en aide...

C'est mon-amie-ma-soeur Nadyne qui m'a pratiquement sauvé la vie en me conduisant d'urgence chez le médecin qui assurait mon suivi. Cette dernière a cru bon de me référer aux urgences de l'hôpital près de chez moi afin de me mettre sous observation et d'augmenter ma dose de médicaments. Je voulais mourir et elles n'ont pas pris de chance. Je leur suis extrêmement reconnaissante à toute les deux.

J'ai attendu 6heures aux urgences, mon cas n'étant toutefois pas critique, qu'un psychiatre soit disponible. Ma maman était venue prendre la place de Nadyne qui avait donné tout ce qu'elle avait pour me soutenir. Évidement ma mère était forte comme elle m'a appris à l'être, mais elle pleurait quand même. Comment, en tant que maman, supporter de voir sa fille à l'hôpital parce qu'elle veut mourir. Moi-même je n'y comprenais pas grand chose, je savais que cela avait quelque à voir avec le taux de sérotonine. Mais je crois que j'étais surtout hors de mon corps.
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Je crois que le pire fut de raconter. Raconter à mon médecin, à l'accueil des urgences, à l'infirmière chargée de faire le tri, à l'étudiante qui fait son internat, et finalement au psychiatre. Par la suite, ils ont décidé de me garder pour la nuit sous observation, en attendant qu'une chambre se libère à l'étage. La nuit a été pénible mais rien de dramatique. C'est le choc de voir que l'on va vraiment mal à ce point qui est déstabilisant. Quoi que pour la stabilité à ce moment-là...

Puis les trois jours dans une chambre seule. Mon père a peur du sang et de la maladie comme une religieuse de l'enfer, et il est venu me voir. J'était dans l'aille psychiatrique de l'hôpital, dans une chambre seule pour commencer sans mes vêtements, sans papier ni crayon, tout mes effets personnels étant gardés sous clefs pour que je ne puisse pas, ne pas prendre conscience de l'état dans lequel je me trouvais alors. Je crois que cette étape est cruciale et détermine de toute façon la gravité de l'état dans lequel se trouve le patient.
Je restait assise toute la journée sur le rebord de la fenêtre à regarder la chapelle changer d'aspect avec l'humeur du ciel.

Puis on m'a transférer dans une chambre avec une religieuse, gentille et coquine comme une enfant rebelle mais bavarde comme une pie. J'ai lu sans arrêt et je ne me rappelle plus de rien, j'était loin de mon esprit, toute déconnectée. Les visites m,ont fait énormément de bien, de savoir que telle ou tel personne est venu me voir, que cette personne a pris le temps de se rendre à l'hôpital avec ma personne dans ses pensées... Cette simple manifestation d'amour est pour moi encore quelque chose d'immense que je n'oublierai jamais, comme je n'oublierai jamais mon déjour à l'hôpital.

Les anges qui travaillent dans le secteur psychiatrique, surtout les infirmières de nuit, l'attention qu'on se porte à soi-même par obligation, sont autant de belles choses qu'on refuse de croire à l'arrivé et qu'on se refuse à revivre par la suite. La violence démesurée, l'angoisse de la prochaine minute, les cris et les larmes des patients sont autant de drames qui m'ont fait apprécier ma propre existence.

La fille qui a séjourné 2 semaines à l'hôpital était vide, un sac de chaire et de sang. Mais dans la chaire et le sang il y a la vie et la conscience.
Je suis revenue. Et je suis plus forte que jamais bien évidement. Mais il n'y a pas de mots pour décrire le retour de l'antichambre de la mort. Parce que c'est là que je me trouvais, j'avais un pied de l'autre côté et on m'a empêché de faire le dernier pas qui m'aurait conduit vers l'irréversible.
J'ai retenu mon souffle et je suis revenue pour respirer plus profondément que jamais je n'ai respiré dans ma vie.

Ann Sarah

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Ann Sarah
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